bienvenue à Fort Niolon

Ainsi que mes autres petits camarades stagiaires pédagogiques de l’ASM, je me disais que j’avais tout le temps de me préparer à la session MF1 de septembre. C’est pourquoi je ne me préoccupais pas des nombreuses lacunes dont ma démarche pédagogique générale était entachée. En clair, j’étais à la rue. Mais bon, comme on était tous dans le même cas, c’était pas grave. Et puis le hasard de la vie est venu contrarier cette petite situation confortable. Au bout de trois ans et demi passés à la raffinerie de Provence, l’heure était venue de passer à autre chose, et tout s’est accéléré. J’allais travailler au Gabon à partir du mois de septembre. Parmi les nombreuses conséquences que cette affectation allait entraîner, l’impossibilité de participer à la session de septembre en était une. Alors bon, c’est pas que j’avais travaillé comme un fou pour le MF1, loin de là, mais je me suis dit qu’avoir ce diplôme aurait été une belle façon de conclure trois années de plongée en Provence. Et surtout ça m’aurait embêté que les autres ASMeux l’aient et pas moi ! Faut pas pousser mémé dans les orties.


Alors que faire ? Tout simple : s’inscrire à la session de juin, ce qui me laissait environ trois semaines pour me préparer. Ouais, préparer que dalle en fait. La péda, bon, c’est pas en trois semaines que je vais passer tous les cours en revue, et puis, y’avait tout de même les préparatifs pour le Gabon et le permis moto – c’est vrai qu’à ce moment-là tout se bousculait. Et la DTH, comprenez démonstration technique avec handicap, j’ai pu en faire 3, dont 2 ratées, avant le stage final. Côté préparation on pouvait rêver mieux.


planning d'une semaine à Niolon

Mais bon, étant d’un naturel confiant, j’ai pris ma voiture direction Niolon en étant sûr d’en revenir avec le diplôme. Il n’a pas fallu longtemps pour cette certitude s’envole comme un bob mal rivé sur un crâne chauve un jour de grand mistral. L’accueil se passe bien et réserve une bonne surprise : nous ne serons que 5 participants au stage final pour 8 encadrants. C’est du luxe. Alors au début ils étaient tous très sympas, copain copain et tout, impeccable. Mais bon, ça durera pas longtemps. Au cours de l’accueil se déroule la présentation du programme de la semaine. Toutes les journées suivront le même canevas : le matin de 8 à 10, DTH, puis de 10 à 12, péda pratique et préparatoire sur le quai. L’après-midi, péda théorique en salle. Programme un peu différent pour le premier jour où une DTH est prévue l’après-midi en plus d’un cours théorique.


Alors c’est parti, premier cours et première baffe. On nous file 3 sujets et après 10 minutes un type passe au tableau et fait son cours. Ma foi c’était pas mal, j’y trouvais pas grand’chose à redire, je me dis balaise le gars, en voilà un qui l’aura. C’est là que le ton de la semaine est donné : les encadrants descendent en flamme la prestation du pauvre type qui, je le crois, mouilla son pantalon. Ils ont trouvé tout un tas du défauts : pauvreté du contenu, médiocrité de la démarche pédagogique… ça fait mal. Bon, la séance se termine par l’énoncé de 3 sujets à préparer pour le lendemain puis on part pour la DTH où aucune mauvaise surprise ne nous attend. A partir de mardi toutes les journées seront un peu les mêmes : bateau le matin, pas vraiment de problème. Péda sur le quai : ça va à peu près. Le midi repas pris à la cantine dans une bonne atmosphère, puis révision des sujets à la terrasse du bar jusqu’à 14h et ensuite massacre généralisé à la péda théorique.

les échelles du quai

une délégation de l'ASM pour soutenir Pierre Jean

C’est vrai que ces après-midi furent difficiles : remises en cause permanentes de ce qu’on avait fait jusqu’à présent et petit à petit le doute s’installe chez tout le monde. Avec le recul on se dit que c’est la technique Niolon, mettre la pression pour obtenir le meilleur, mais sur le coup on n’y pense pas et les réactions sont de 2 types : ceux qui vont boire des coups au bar en disant mais c’est bon vous inquiétez pas, et ceux qui se disent bon là on est dans la merde, va falloir s’y mettre. Moi j’étais dans la deuxième catégorie et chaque minute libre fut consacrée aux révisions du contenu, de la réglementation, de la péda, et tous les soirs jusqu’à minuit, et la nuit lors des insomnies… cette semaine fut entièrement consacré à la plongée, c’est la première fois. Il y eut quelques bouffées d’oxygène, notamment la visite de Robert, Sandrine et Laurent. Oulala que j’étais content de les voir.


Qu’on ne s’y trompe pas : j’étais réaliste, c’est-à-dire peu confiant en mes chances, mais tout de même positif et ma foi assez battant. Bon ça va qu’on était un bon groupe et on s’est vraiment bien marrés. Entre les cours je veux dire. C’est vrai que le rire est un bon moyen d’évacuer la pression. Puis vînt le samedi, jour de l’examen.


Bon ça commence par un truc facile : la réglementation. Aucun problème. Faut dire que je l’avais travaillée tous les matins de 5 à 6. Bon ensuite ma bête noire : la péda théorique. Sujet tiré : la compressibilité des gaz au niveau 4. OK, ça va à peu près. 20 minutes de préparation puis passage devant le jury. Je n’en connaissais aucun membre. Alors toute la semaine on nous a rempli la tête de transversalité, alors je me suis efforcé d’axer ma présentation sur essentiellement toutes les applications pratiques et j’étais bien content de moi. Au bout de 10 minutes le jury m’arrête et me dit bon quand est-ce que vous nous parlez du sujet ? Hum, pardon ? Ben je fais de la transversalité, c’est pas bien ? C'est-à-dire qu’il nous faudrait quand même les bases théoriques, pour l’instant c’est pas le cas, l’objectif du cours n’est pas atteint. OK, bon, à mi-séance, improvisation totale pour refaire un cours correspondant aux attentes du jury. A la fin, pas un commentaire, je sors.

la sortie de la calanque

passage d'une épreuve

Bon, là le moral en prend un coup sérieux pour la première fois. Là je me dis, OK, plus le droit à l’erreur sinon c’est fini. Va falloir cartonner aux 2 pédas qui restent.

Le midi, repas triste pour la première fois. Pis les autres autour ils étaient tout contents d 'eux, ah ça m’énervait ! L’après-midi, DTH. Ça ne se passe ni bien, ni mal mais aucune grosse erreur n’est commise. Bon, ça passe.

Et alors ensuite la clé de la journée : péda pratique. C’est là que tout se joue. Tirage du sujet au sort : votre plongeur est un enfant de 8 à 10 ans etc etc…


Un quoi ? Un enfant ? Alors là c’est la cata : tout s’écroule dans mon esprit. La plongée enfant est le seul domaine sur lequel j’avais fait l’impasse. Au club on n’en a jamais parlé et le sujet n’a pas été évoqué une seule fois lors du stage final. En fait je n’avais pas fait l’impasse volontairement, j’avais simplement « oublié » la plongée enfant. Bon, préparation sans entrain et présentation morne et inintéressante. Lors du debriefing : bon, si tu avais fait le cours pour un adulte, qu’est ce qui aurait été différent ? Rien. Bon, ça veut dire que l’objectif n’est pas atteint.

OK, là c’est fini. Il reste bien la péda préparatoire mais ça ne rattrapera pas les échecs des pédas théorique et pratique. La péda préparatoire se déroule comme la DTH : ni bien ni mal. Au moins c’est fini, plus qu’à attendre les résultats. C’est bizarre mais je n’ai aucun stress. Je suis plutôt résigné et certain que tant pis, je l’ai pas eu, mais je méritais pas de l’avoir, donc c’est normal.


avec son diplome, Pierre Jean prend de la hauteur

On se rend sans hâte à la terrasse du bar et Daniel Huron arrive avec les diplômes, suivi de tout le jury. Et c’est l’annonce des résultats.
Monsieur Machin, félicitations, monsieur Bidule, félicitations, monsieur truc, félicitations, et enfin monsieur Pedrocchi, félicitations. Les autres, désolé.

Ben ça alors j’en reviens pas. Comment ça se fait ? Ben dis donc. Bon hé ben je suis content finalement. Alors je me suis rué sur mes jurys pour les remercier. On est 4 sur 7 à l’avoir eu.

Restait plus qu’à faire croire à l’ASM que je l’avais raté. Bon j’ai pas trop réussi faut dire. Ah si, Sandrine a quand même marché. Ça m’a fait bien plaisir.

Texte : Pierre-Jean (MF1 n°11360). Photos : Laurent.