Quand on a la chance d'avoir la mer à notre pas de porte, c'est à l'intérieur des terres qu'il nous faut trouver le dépaysement. Le mistral, l'eau salée, les sars et les gorgones, c'est beau mais y a pas que ça dans la vie ! De temps en temps, il faut savoir aller visiter d'autres eaux (à ne pas confondre avec visiter d'autres zoos).

Ouvrir nos horizons, c'est justement le but de la commission qui, en collaboration avec Georges Olivari de la Maison de l'eau de Barjols organise chaque année un week end découverte 'eau douce'.

Au programme cette année, ballade dans le parc du Queyras avec une plongée dans le lac de la Roue, lecture de paysage, conférence sur 'les milieux aquatiques des têtes de bassin' et hydrobiologie dans le Guil.


le lac de la Roue

le lac de la Roue

Le lac de la Roue est situé à 1847m d'altitude au dessus de Chateau Queyras entre Souliers et Arveux. S'il n'était une digue pour rappeler que le plan a été voulu pour attirer le touriste, rien ne permettrait de douter que Mere Nature ne soit pas à l'origine de ce petit coin de paradis.

Même si le cadre est magnifique, nous sommes là pour nous enfoncer sous la tourbe découvrir les mystères de ses radeaux flottants. Ce n'est pas le seul objectif, le parc naturel du Queyras ayant besoin de photos sous marines, nos clichés seront les bienvenus.

Le lac fait à peine plus de 4m de profondeur, mais en si peu de profondeur le changement est radical. De la lumiere mordoré juste sous la surface à l'obscurité totale (mais alors là, totale de chez totale) 3m en dessous, c'est vraiment glisser en plusieurs strates d'un monde à l'autre. Sans parler de la température qui chute plus vite que la visu ! Panard total !


visions de l'herbier visions de l'herbier visions de l'herbier visions de l'herbier

On retrouve aussi notre pote de la plongée au lac de Quinson, le Potamot Pectiné qui n'a eu aucun probleme pour coloniser de manière massive le lac ! Il finit par former un mur impénétrable et, pour accéder à l'autre rive, il ne faut plus nager mais pratiquement ramper à sa surface !


le têtard, un habitant du lac autoportrait blafard la tourbière en formation

Par contre, la tourbe a énormèment progressé depuis la dernière plongée en ce lac en 1991. Une tourbière, c'est une zone humide colonisée par la végétation. L'eau stagnante prive d'oxygène les micro-organismes responsables de la décomposition des végétaux. La matière organique mal et peu décomposée, s'accumule peu à peu gagnant depuis le bord, forme des radeaux et s'agrége finalement en une couche épaisse : la tourbe. A la Roue, les radeaux ont forci en 15 ans et il n'est plus possible de se glisser dessous. Dommage, il parait qu'entre les fosses de lumière, la vision était enchanteresse. Bin tant pis !


au belvédère un paysage magnifique

Après le picnic à proximité du lac, Georges nous fait découvrir le belvédère avec une vue époustouflante sur Chateau Queyras et la vallée du Guil. Pour répondre au lent affaissement progressif de la pente, les arbres se contortionnent pour pousser vaille que vaille droit d'où des troncs à l'étrange courbure en tuyau de pipe.

les arbres en tuyau de pipe

Plus tard dans l'apres midi, on se replie sur Abriès où Georges Olivari donne sa conférence sur les milieux aquatiques dans la partie haute des bassins. Une conférence dont le parc naturel du Queyras sera bien sur la vedette.


la conférence

Le parc de 60330 hectare et 2500 habitants a certes été créé en 1977 mais bien entendu, son histoire remonte bien plus loin dans le temps :

  • -300 millions d'années : on trouvait ici une veille chaine de montagnes érodées
  • -240 millions d'années : la montagne a laissé la place à une mer de faible profondeur et le climat s'est réchauffé
  • -180 millions d'années : cette mer s'élargit et devient un océan
  • -140 millions d'années : se sont formés de grands bassins sédimentaires
  • -70 millions d'années : la croute océanique sédimentaire est poussée vers les 3000m d'altitude et sous l'action de l'énorme pression se métamorphose en roche


  • Le résultat de ces quelques 300 millions d'année d'évolution se retrouve sous nos yeux quand on traverse le Queyras entre les larges vallées évasées par l'eau dans les massifs schisteux mous et les vallées encaissées difficilement percées dans le dur calcaire.


    Abriès

    Après l'historique de la région, on se concentre sur le destin du Guil, affluent de la Durance qui se jette dans le lac de Serre Ponçon. A travers les explications de Georges, on découvre une rivière vivante, une entité certes mal en point (la qualité de l'eau médiocre avec seulement 3 stations d'épuration) mais pleine de ressources. Sans l'intervention de l'homme, la rivière a les moyens (micro-organismes, filtre des Potamots) de se défendre contre l'agression des pollutions. Mais dans certaines limites seulement et un contrat de rivière a été signé entre les différents acteurs locaux pour améliorer la qualité de l'eau, prévenir les crues et mettre en valeur ce patrimoine unique. Un programme ambitieux mais vital.


    Le soir au refuge, Bernard Rothan nous fait partager ses incroyables photos sous marines en 3D. Oui, en 3D avec les lunettes comme dans La créature du lac noir ou dans Freddy ! En mieux, en bien mieux : à la visionneuse binoculaire, le résultat est spectaculaire. Plongeur ou poisson, coraux ou chapelets de bulles se détachent avec une précision parfaite comme des scupltures et on se surprend à bouger la tête pour tenter de les découvrir de dos. Fabuleux ! A ce propos, le Hors Série n°2 de Subaqua, fourni avec des lunettes, est consacré aux photos de Bernard. A commander au plus vite à la boutique fédérale !

    l'auberge      Bernard et son appareil photo 3D      hydrobiologie : la recherche de specimen

    Après une nuit passée à Abriès, nous repartons en ballade dans le Queyras à la découverte de ses paysages et de ses habitants. Mais le point fort de la journée est la leçon d'hydrobiologie menée par Georges dans le Guil où il nous emmène à la découverte de la vie qui se cache même dans le cours d'eau le plus exubérant.


    George nous montre des larves fixées sur une brindille au bord du Guil leçon de chose les pieds dans l'eau

    Après s'etre mouillé les pieds dans le Guil, il s'agit déjà de rentrer à sa maison apres un week end riche en découvertes. A l'année prochaine !

    Texte et photos : Laurent.