Qu'elle drôle d'idée que de vouloir passer un monitorat de plongée !
Déjà que franchir le pas du N3 au N4, c'est se récupérer un sacré paquet de responsabilités mais vouloir devenir moniteur bénévole, ca relève de l'inconscience la plus totale ! On n'y récolte que des tracas, des ennuis, du rangement au club après la plongée jusque pas d'heure et le risque d'une visite prolongée aux Baumettes en cas de problème.

Alors franchement pourquoi devenir MF1 ?

A chacun de trouver son pourquoi (fastoche : les femmes, la fortune et la gloire, bien sûr !). Pour le comment, la route est toute balisée.
Pour nous, elle a commencé en douceur avec l'initateur de club passé l'année dernière. La difficulté est loin d'être celle du monitorat, mais l'épreuve permet de commencer à nous familiariser avec la notion de livret, la notion de pégagogie et la mise en place de séances.
Avec un niveau 4 doublé de l'initiateur, on peut déjà faire des baptemes, être DP en piscine, enseigner jusque 20m, c'est pas rien ! Mais si la carte CMAS indique Moniteur 1*, c'est certes être monté sur le podium, mais seulement sur la marche la plus basse. Difficile quand on a le sommet en vue de faire demi tour pour retourner dans la vallée, la dernière étape est ptête la plus difficile, mais c'est celle là qui compte !



Le stage initial

le batiment qui accueille le siege du comité régional

Le début de ce marathon de longue haleine, c'est, en janvier 2004, le stage initial, une formation de 6 jours en formule au choix : en continu ou éclatée en 3 week ends successifs. 6 jours d'affilée, ca ne doit pas être rigolo mais 3 weeks ends passés au siège du comité provence, ça fait un tunnel sacrément long. Quand on quitte le boulot le vendredi soir, ce n'est pas pour passer 2 jours de glandouille et de plongée mais pour aller s'enfermer 2 jours en salle. A la fin, c'est duraille.

A la fin du mois, on est plutôt content que le stage se termine et que nous soit remis le livret convoité qui fait officiellement de nous des stagiaires pédagogiques. Maintenant, yapluka l'remplir !

pendant le stage en janvier 2004




Le livret pédagogique

le livret qu'il faut remplir

Le stage pédagogique, c'est :

  • 12 séances de pédagogie préparatoire
  • 20 à 22 séances dans l'espace proche
  • 19 à 21 séances dans l'espace médian
  • jusque 4 séances dans l'espace lointain
  • 17 séances de pédagogie théorique

    Soit, si on fait l'addition : 72 séances couvrant les 3 pédas pratique (avec scaphandre en immersion), préparatoire (sans scaphandre et avec scaphandre en surface) et théorique (sans scaphandre, assis dans une salle le stylo à la main).


  • Pas obligatoirement facile de caser tout ça avec sa vie personnelle et la vie du club ! Paradoxalement peut être, les cases les plus difficiles à remplir concernent l'espace proche. Cette année, il y eut plus de stagiaires péda à l'ASM que de débutants ! Heureusement rien n'empêche d'aller se muscler son expérience dans d'autres structures. Une démarche à recommander même ! Ca semble bêta de le dire : mais pour préparer le MF1, faut encadrer le plus possible et varier ses expériences !

    La péda, c'est bien beau mais on a pas besoin de grosses cuisses pour être moniteur ? En fait non, les grosses cuisses, c'est pour le N4. On ne nous demande qu'une épreuve physique mais quelle épreuve : la Démonstration Technique avec Handicap de 25m, ze DTH !

    Robert valide des séances sur le livret

    un moment historique : envoi de la candidature finale

    Les palmes des vieux (et moins vieux) de la veille peuvent se plisser de perplexité : Pardon ? La DTquoi ?
    La DTH est en fait la nouvelle dénomination du sauvetage palmes, épreuve ô combien redoutée ! Ca surprend la 1ère fois où on entend ça mais le changement de nom s'impose pour bien souligner le changement de la philosophie de l'épreuve. Ce n'est plus l'épreuve de force où il fallait remonter coute que coute des plongeurs gueuses accrochés au fond mais un exercice technique où le cobaye se fait tas de gelée aussi léger (normalement) qu'une plume ! Pour autant, il faut comprendre que l'épreuve n'est pas plus facile mais seulement différente. La tenue du détendeur, le confort, le respect de la vitesse de remontée : la technique est aussi importante que la remontée en surface du cobaye.




    Le stage final

    Sandrine prête à affronter Niolon

    A y est ! On y est !
    On savait qu'on y passerait un jour mais c'était juste une date lointaine, très lointaine sur notre agenda. Et pis voilà, un an et demi est passé depuis notre stage initial et c'est lundi matin et il faut se présenter à l'UCPA à Niolon pour aller au charbon.

    On sait à peu près à quoi s'attendre par le témoignage de ceux et celles qui sont déjà passés par là. Le stress, les doutes, l'envie grandissante de se sauver à toute jambes... C'est une chose de savoir à quoi on va devoir faire face, c'est autre chose que d'y être confronté.


    les chambrettes de Niolon dans le labyrinthe des coursives de Niolon la salle mérou où se passent nos cours

    On est réparti en petits groupes et toute la semaine sera une alternance de cours théoriques à préparer en salle et de cours pratiques à donner en situation ou presque. Pour la plongée ? C'est, en 5 jours, 1 DTH à blanc, une descente à 40m et des sauts de grenouille dans 5m d'eau devant le quai. Bref, on cause beaucoup mais on pratique pas !

    Une des difficultés, c'est qu'il faut s'adapter au cadre et dépieuter la moindre opération. Le quai de Niolon fait un bon mètre de haut, les échelles sont acrobatiques et selon les endroits, il y a pied. Pas question de prétendre qu'on est sur l'Anthias et une simple mise à l'eau de débutant devient source d'angoisse. Sauter tout équipé ? Nan. Descendre à l'échelle équipé ? Exclus. Equiper dans l'eau ? Trop difficile. La soluce ? Le faire descendre à l'échelle et le faire se glisser directement du dernier barreau dans la stab qui l'attend à l'eau. A voir en situation !

    depuis le temps qu'on entendait parler du quai de Niolon

    les casiers de bois où on entrepose notre matériel de plongée

    Nos encadrants ont 5 jours pour nous secouer dans nos petites habitudes et nos grandes certitudes. Le délai est court, la méthode doit être brutale et le traitement de choc !

    On parle plongée du matin 8h au soir 23h00 (le soir y a rab de cours pour les volontaires) et on se fait descendre en flammes la moitié du temps. Après quelques jours de ce régime assaisonné des mauvaises nuits passées dans les petites casemates de Niolon, on en vient à complétement douter de ses compétences.

    Pourtant, après ma 1ere journée, j'étais confiant : "hé bin, pas de quoi en faire toute une histoire !". Mmm, ça a pas duré. 1 heure au tableau le lendemain à me faire mettre en pièces (mais c'était mérité, j'avais pas préparé mon sujet) a été le début d'une lente déchéance.


    Quand arrive le vendredi, j'suis réduit à l'état de zombi paranoïaque répétant sans cesse 'célakata, célakata, célakata' et j'ouvre la bouche comme j'irai, résigné, à l'abattoir. Arrivé là, j'suis franchement dégouté à l'idée d'encadrer autre chose qu'un tableau sur le mur ! Il s'est envolé mon mojo !


    Pourtant, la semaine est aussi constellée de -osons le mot- révélations. Comme l'approche de l'enseignement de la stab ou l'insistance en péda théorique à ce que les cours ne parlent ni de maths, ni de physique, ni d'anatomie mais bel et bien de plongée. Une évidence ? Pas si sûr. Qui n'a jamais suivi un cours de physique appliquée à la plongée ? Et si on faisait plutôt des cours de plongée où interviendraient, quand elles sont nécessaires, des notions de physique ? Ce sont p'tete des principes simples mais illuminés par prise de conscience toute nouvelle.

    une bouteille de l'ASM perdue au milieu des blocs de l'UCPA

    Finalement, le début des épreuves est presque une libération. On y arrive assez stressé (j'ai pas dormi plus de 2 heures la veille de l'exam, qui dit mieux ?) mais on a suffisament à faire pour ne pas trop cogiter. Trop tard pour se poser des questions, faut foncer !


    les ASMeurs au début des épreuves départ pour la DTH

    La DTH ayant été évacuée dès le vendredi après midi pour cause de nombre de candidats important, on enchaine les épreuves de réglementation et les 3 pédas pendant la journée du samedi. Pour la péda préparatoire, je tombe sur le saut droit en prépa niveau 1. On peut tomber sur pire ! En situation réelle, c'est 2 minutes d'explication et c'est un sujet défriché pendant la semaine en plus. Blabla et réalisation de l'exercice. OK, j'ai dit pareil que l'autre aprem, ça doit pas être mauvais.
    Alors pourquoi ils me regardent comme ça ?
    "Qu'as tu à dire sur la manière dont ton élève a réalisé l'exercice ?". Ah euh, bin, il a fait ça et ça. "Et c'est tout ?". Mince euh... Pinaise, qu'est ce que j'ai pu oublier ! Mais est ce que j'ai oublié quelque chose au moins ? "Hon hon, on te pose la question, c'est tout." Grosses gouttes de sueur, voix qui essaye de se montrer ferme et confiante : Oui, c'est tout. "Ah". Oh, oh, j'ai comme qui dirait un mauvais pressentiment d'un seul coup.

    Péda pratique : brouillonne mais ca va (c'est agacant qu'on trouve toujours quelque chose à ajouter au fur et à mesure) et je termine au sec par la péda théorique. Je redoute les sujets trop généraux mais par contre un p'tit 'Elements de calcul de tables au N4', ca me dirait bien. Je tombe sur les ordis pour le N2. Présentation ni bonne, ni mauvaise.


    passage de la péda préparatoire la barge de Niolon pendant l'épreuve de DTH examen en cours sur le quai

    l'attente des résultats

    D'un seul coup, a y est c'est terminé ! Soulagement ? Pas vraiment car c'est l'attente des résultats qui commence. On s'occupe de manière utile en remballant ses affaires de plongée et son couchage mais quoi qu'on fasse, on finit tous par se retrouver agglutinés devant la salle où se déroulent les délibérations.

    l'attente des résultats

    Quand on a fini de se ronger les ongles de tous les doigts des deux mains et que le jury finit par sortir, je cherche Robert des yeux et je scanne aux rayons X son expression. En pure perte, Robert se montre plus étanche que le Terminator et ne laisse rien transparaitre. Le suspens atteint son comble quand on se prépare à entrer....
    ....sauf que ce n'est pas encore à nous. Naaaan ?
    Si ! Les dés en sont ptête jetés mais on est en train de préparer les diplômes et la paperasserie qui va avec. Y zont quoi comme imprimante ? On en peut plus nous là !

    C'est encore bien plus tard qu'on nous laisse enfin entrer pour assister à l'annonce des résultats. Les résultats enfin ! Enfin... presque.... Place à la lecture de la charte du moniteur !
    Ouuuuiinnnnnn ! Est-ce qu'un MF1 peut reluquer les filles qui se désapent dans la cabine, dégobiller dans l'aquarium après avoir abusé du placard à bibine et coller un taquet à celui qui loupe une RSE ?
    Bin, j'en sais rien ! Parce qu'on est sur des charbons ardents et que j'ai du mal à me concentrer sur la lecture de la charte. Alors y viennent ces satanés réééééésuuuuuuuuuuuuuuullllllll...


    Daniel Huron et Jacky Britz annoncent les résultats

    Frédéric DiMéglio fait signer la charte à la majore de promo

    Bernard est fier de son diplome

    ...tats !
    A y est, a y est ! Daniel Huron et Jacky Britz passent aux choses sérieuses. "Le major de promo est une majorette.... Sandrine Zaegel". La Sandrinette vient chercher son diplome toute émotionnée et l'ASM commence fort. Une majore et une deuxieme monitrice formée au club après Sandrine Loiseau. 2 MFUne et 2 Sandrine ? Une simple coincidence ? Hé, Audrey, tu pars avec un handicap !

    Les noms sont annoncés les uns après les autres et le stress augmente autant que la pile des diplomes diminue. Mais tu vas le cracher mon nom ou quoi ?

    Des noms...

    Bernard est annoncé et se lève à son tour.

    Des noms....

    Mon nom. Yeah baby yeah !

    Je me lève sous les flash des photographes, les acclamations de la foule et je remonte le tapis rouge jusque...
    Ah non, ça se passe pas comme ça du tout mais c'est l'impression que ça donne. Je fais 2 gribouillis en guise de signature sur mon bô diplôme et ma charte du moniteur ('...est un exemple pour l'ensemble de la jeunesse...' qui ça ? moa ? ohlala) et je retourne m'asseoir pour entendre la suite.




    Alors, ça fait quoi, le MF1 ?

    Bin, sur le coup, ca fait vachement plaisir mais ce n'est pas l'impression d'être le roi du monde ressentie au N4 qui m'envahit mais plutôt un vertige. Avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités. Nul doute que les grandes responsabilités on les a. Reste à acquérir les super pouvoirs qui vont avec. Maintenant que le papier trône fièrement dans le salon, le plus dur reste à faire : devenir, jour après jour, semaine après semaine, mois après mois, un moniteur !

    Texte et photos : Laurent.



    le diplome du MeuFeu1 la charte du moniteur




    Merci, merci, merci, merci, merci et mille fois merci !

    Réussir un monitorat, c'est comme poser le pied sur la lune : derrière celui qui décroche la timballe, il y en a beaucoup, beaucoup d'autres qui ont contribué à l'exploit. Alors derrière mon bô diplôme, il y a tous ces gens qui, tout au long de ces 6 dernières années, m'ont aidé, conseillé, inspiré, fait travaillé, soutenu ou motivé d'une façon ou un autre. Bref, qui y sont un peu, beaucoup à la folie pour quelque chose !

     

    Alors merci...

    à tous mes partenaires de palanquée pour la compagnie

    à tous les encadrants qui m'ont balladé pour les belles ballades et pour les moins belles aussi

    à tous les encadrants qui m'ont fait bosser pour tous ces niveaux passés les doigts dans le nez (enfin presque)

    à tous ceux que j'ai eu le privilège de baptiser, encadrer et faire travailler pour m'en avoir appris bien plus que tout ce que j'ai pu, moi, leur enseigner

    à la FFESSM, ses encadrants et tout le staff qui nous a encadré lors du stage final pour nous avoir autant supportés que titillés et avoir fait des heures sup les soirs

    à Olivier Guys du Centre Cassidain de Plongée pour m'avoir accueilli dans sa structure et l'inestimable expérience que ca m'a apporté

    à Pierre "grosses cuisses" Jean l'Gabonnais pour son coup de fil africain d'encouragement la veille de l'exam et pour toutes les beutises qu'on aura faites ces 3 dernières années

    et puis, bien sûr, à l'ASM et à tous ses membres avec mention à notre Robert Brun, seigneur des TIVs et de l'Anthias


    Et puis et puis bien sûr, 2 extra special thanks :

    au senpaï Robert Giraud à qui je dois, voyons : mon N1, mon N2, mon N3, mon N4, mon initiateur et mon MF1 ! Quand je vous tappe sur les nerfs, vous savez maintenant à qui vous devez vous en prendre !

    à Sandrine Loiseau, ma marraine de plongée sans qui, bin, je serais pas là aujourd'hui et à qui je dédie, carrément, ce bô MeuFeu1 tout neuf !